Jean Pelletier (1627 - 1698)
L'ancêtre "canadien"
Guillaume Pelletier (1598-1657), dont la femme, Michelle Mabille (1597-1667?), avait déjà 48 ans, quand le couple arriva au Canada en 1641 ne laissa pas d'héritier de naissance canadienne. C'est son fils, Jean, venu avec ses parents de France, qui perpétuera son nom au Canada. Quoique de naissance française, Jean Pelletier mérite d'être considéré comme le premier ancêtre "canadien" de cette branche des Pelletier qui s'est abondamment ramifiée au Canada, particulièrement dans la région de Québec, et plus encore dans celle du "bas du fleuve". Arrivé au pays à quatorze ans, telle une jeune pousse importée et transplantée en pays étranger, c'est en terre canadienne qu'il prit définitivement racine. Quand Jean s'embarque pour émigrer au Canada avec ses parents et son oncle, Antoine, en 1641, il a 14 ans. L'adolescent goûte sans doute l'aventure de la traversée. Mais une aventure plus grande encore l'attend : s'enraciner dans un pays neuf et croître avec lui.
Le "donné" des Jésuites
De fait, la vie de Jean au Canada tourne vite à l'aventure : il se "donne" aux Jésuites! En 1646, Jean a dix-neuf ans. Il est assez vieux pour faire équipe avec son père, l'ouvrier, qui, à l'époque, comme il nous est permis de le croire, ne s'étant pas encore établi sur sa terre de Beauport, exerce ses nombreux métiers au service des chantiers de construction de la région. Probablement à Québec où les Pères Jésuites ont établi le centre de leur rayonnement missionnaire. En tout cas, Guillaume et son fils, Jean, semblent oeuvrer dans l'entourage immédiat des Pères. Le P. Jérôme Lalemant écrit dans le Journal des Jésuites, au mois d'août 1646 : "Le 28, je partis seul dans un canot pour aller aux 3 Rivières. Je menai avec moi dans une chaloupe 2 hommes et un enfant. L'un des hommes était le fils du gobloteur, nommé Guillaume Pelletier, déserteur (défricheur), scieur de long, charpentier, charbonnier etc. Il se donna tout d'un coup; on promit toutefois à ses parents cent francs pour sa 1e année, et on ne laissa pas de l'habiller tout de neuf. Il apprend, peut-être par le Père Lalemant lui-même, le prochain départ de celui-ci pour Trois-Rivières. Spontanément, "tout d'un coup", il s'offre à partir avec lui : il se donne.
Au Fort Sainte-Marie-des-Hurons
Établir que Jean Pelletier fut un donné des Jésuites est une chose; conclure que, en tant que tel, il est allé servir dans la Huronie, au bord de la Baie Georgienne, en est une autre. Pour l'époque concernée, l'histoire ne nous a pas conservé de listes (catalogues du personnel) que fassent l'énumération complète des laïcs affectés à l'oeuvre du Fort Sainte-Marie. Tout au plus une lettre du P. Ragueneau du 1er mai 1647 nous permet de savoir que l'automne précédent (1646) le fort abritait 15 donnés, 5 engagés et 4 enfants. Seuls des rapprochements et recoupements de textes permettent aux historiens de reconstituer avec une certaine exactitude les listes de noms correspondant à chacune de ces catégories. En ce qui concerne Jean Pelletier, nous n'avons que les renseignements que nous fournit le "Journal des Jésuites" dont nous avons déjà cité un extrait. Cet extrait nous a appris que Jean accompagna le P. Lalemant en partance pour Trois-Rivières. Comme Trois-Rivières était alors une mission importante, on pourrait se croire tout au plus autorisé à comprendre que c'est là que Jean alla servir les Jésuites comme donné. Pourtant une lecture attentive de la suite du récit, même si le nom de Jean Pelletier n'est plus mentionné explicitement, nous permet de conclure que, en 1646, celui-ci ne s'arrêta pas à Trois-Rivières, mais accompagna un convoi de Hurons jusqu'au Fort Sainte-Marie.
Mariage difficile à conclure
Aucun document ne permet vraiment de dire quelle fut la durée exacte du séjour de Jean Pelletier en Huronie. Jean Côté, dans l'ouvrage déjà cité, conclut qu'il en serait revenu en 1649 du fait qu'il se maria à Québec cette année-là. Mais, si effectivement Jean Pelletier attendit jusqu'au 9 décembre 1649 pour se marier à Québec, ce n'est pas parce que, jusque-là, il servait en Huronie comme donné; mais parce qu'il lui avait été interdit de se marier plus tôt. Léon Roy, en effet, parlant de la donation de Jean en 1646, écrit : "Il ne devait pas avoir la vocation. L'année suivante, il fiança Anne Langlois". De fait, il voulut se marier cette année-là, 1647; mais il dût attendre encore deux ans. Les lois de l'Église l'y contraignirent, car Anne n'avait alors que 10 ans! Les trois bans, lit-on dans les registres de Notre-Dame de Québec, avaient été publiés par trois jours de fête en juin et en juillet; mais quand le temps de la cérémonie fut arrivé, quelqu'un découvrit l'empêchement canonique. Née le 2 septembre 1637, Anne Langlois n'avait même pas tout à fait ses 10 ans. Il fallut bien attendre l'âge prescrit par le droit canon, soit 12 ans. Certes les données de cette époque, comme nous l'avons vu, n'étaient pas liés par le voeu d'un célibat perpétuel. Les Ursulines admirent à leur service des donnés mariés. Mais, chez les Jésuites, la permission de se marier résiliait le contrat de "donation". En 1647, par conséquent, Jean Pelletier, ayant tenté de se marier, n'était plus donné. On peut se demander d'ailleurs s'il avait dépassé la période de probation à laquelle étaient soumis les donnés. Le P. Lalemant, en effet, pour convaincre son supérieur général, réticent, de maintenir l'institution, y avait introduit une période d'épreuve, imposé au candidat avant d'être admis à un engagement plus permanent. Quelle était la durée de cette probation? Il y a peut-être un élément de réponse dans le texte du Journal des Jésuites où, au sujet de Jean Pelletier, il est dit qu'une entente fut conclue avec ses parents "pour sa 1er année" : c'était vraisemblablement la période d'épreuve. Le 20 décembre 1648, Jean agit comme parrain au baptême d'un petit frère d'Anne, sa fiancée. On le prénomma Jean.
Ses enfants
Le 9 décembre 1649, Jean Pelletier se mariait à Québec. Le jeune ménage s'installa chez Guillaume Pelletier, le père de Jean, à Beauport. Anne elle-même, fille de Noël Langlois et de Françoise Grenier, était de Beauport. La terre de Noël était la sixième à l'ouest de celle de Guillaume. N'ayant que douze ans à son mariage, Anne fut cinq ans sans donner d'enfants à Jean. Ensuite, la cigogne visita le foyer sept fois. Les enfants furent :
1. Noël (1654-1712), futur époux de Marie-Madeleine Mignot en 1674
2. Anne (1656-1696), épouse de Guillaume Lizot en 1670
3. René (1659-1713), époux de 1) M.-Madeleine Leclerc en 1691 2) M.-Jeanne Godbout en 1713
4. Jean (1663-1739), époux de M.-Anne Huto dit St-Laurent en 1689
5. Marie (1667-1727), épouse de 1) Jacques Gerbert en 1686, 2) Mathieu Guillet
6. Charles (1671-1748), époux de 1) M.-Thérèse Ouellet en 1697, 2) épouse Barbe Saint-Pierre en 1711
7. Marie-Charlotte (1674-1699), épouse d'André Mignier.
À l'exception de Marie, née à l'Ile d'Orléans, tous naquirent à Beauport. Il faut ajouter à cette liste : Antoine et Marie-Delphine, tous deux morts à leur naissance.
Citoyen de Beauport
A la mort de son père Guillaume, en 1657, Jean hérita du bien paternel, à Beauport. Fut-il un grand défricheur? A-t-il été plutôt, à l'instar de son père, un artisan, un homme de métier? Sa jeunesse, marquée par les voyages, par la traversée de l'océan, par les courses évangéliques à la suite des missionnaires, le préparait mal à la vie du colon sédentaire. Ses futures pérégrinations, qui lui feront changer de terre au moins quatre fois, semblent le confirmer. Pourtant le recensement de 1667 révèle que son lot, alors provisoirement cédé à bail, comptait vingt-cinq arpents en valeur. C'était dans la bonne moyenne. Mais, rappelons-le, cette terre, il en était le troisième occupant, après son père et son oncle Antoine. Combien d'arpents neufs furent l'oeuvre de Jean?
Séjour à l'Ile d'Orléans
La famille de Jean Pelletier, en 1665, quittait momentanément du moins, la terre de Beauport. Une double mortalité semble avoir donné le signal du départ. Le 21 janvier, Jean perdait sa mère agée de 73 ans. La même année, c'était le tour d'Anne, sa femme, de perdre sa mère, tuée accidentellement, le 31 octobre. C'est comme si Jean, n'étant plus retenu à Beauport par des obligations de piété filiale, pouvait enfin réaliser un vieux rêve : déménager à l'Iles d'Orléans. Il y a déjà deux ans qu'il s'y est fait concéder une terre. La nouvelle terre de la famille Pelletier, à l'Ile d'Orléans, était située dans l'arrière-fief de la Chevalerie. Cette terre avait été concédée à Jean par les frères Juchereau, fils de Jean Juchereau de Maur. Il avait été devancé sur l'Ile par ses deux beaux-frères. En effet, Jean Langlois-dit-Boisverdun et Noël Langlois-dit-Traversy, les frères de sa femme, cultivaient les deux terres immédiatement voisines de celle des Pelletier. En 1666, le recensement ne nous dit rien du nombre d'arpents défrichés. Nous apprenons seulement qu'une fille est née depuis 8 jours et n'est pas encore baptisée, et que Jean a un domestique de 17 ans travaillant au mois, Guillaume Lemieux. Le recensement de 1667, lui, nous dit que 5 arpents étaient en valeur.
Retour à Beauport
En cette même année 1667, le 8 décembre, Jean vendait sa terre à son beau-frère, Jean Langlois-dit-Boisverdun, et, au cours du printemps suivant, il ramenait sa famille à Beauport, sur sa première terre. Pourquoi? Nous l'ignorons. Rappelons cependant que la plus grande partie de la terre de Beauport n'avait été cédée que par un contrat de fermage, donc pour un temps déterminé. C'est sans doute dans cette maison que, deux ans plus tard, Lizot introduira sa jeune épouse, Anne Pelletier, fille de Jean. En effet, en 1669, Me Vachon, notaire, rédigeait le contrat de mariage de sa nièce, Anne Pelletier, avec Guillaume Lizot. Elle se mariait à l'âge de 13 ans, comme sa mère. Telle mère, telle fille! En 1674, une deuxième noce était célébrée chez Jean : cette fois, c'était son aîné, Noël, qui épousait Madeleine Mignot. Une autre joie l'attendait : en cette même année, sa femme, Anne, pourtant déjà grand-mère, devenait elle-même mère une dernière fois, en donnant naissance à une fille : Marie-Charlotte.
Escale dans les Iles
Père maintenant de sept enfants, dont un tout jeune bébé, Jean semblait destiné à finir ses jours à Beauport, sur la terre qu'il avait héritée de son père. Mais voilà que, en 1675, quittant de nouveau Beauport, il s'embarquait pour l'Ile-aux-Oies. Il partait seul. Sa femme et ses enfants le rejoignirent l'année suivante. Cependant, en 1678, c'est à l'Ile-aux-Grues, à côté, que nous retrouvons sa famille installée sur une terre de 6 arpents de largeur, sur toute la profondeur de l'île, à environ 26 arpents de l'extrémité-est de l'île. Ce n'est pas toute la famille de Jean qui déménagea dans les îles. Ses aînés, Noël, époux de Madeleine Mignot, et Anne, épouse de Guillaume Lizot, étaient restés à Beauport. En 1676, ceux-ci émigrèrent vers la Grande-Anse, là où Jean avait déjà rempli sa mission d'enquêteur pour le compte des Juchereau. Quelle influence joue alors sur Jean Pelletier? Désire-t-il se rapprocher de ses enfants établis à la Grande-Anse? Il ne séjournera pas plus de quatre ans dans les îles. Vendant sa terre à Guillaume Lemieux, son ancien engagé à l'Ile d'Orléans, et devenu depuis son beau-frère, il s'embarqua pour aller ouvrir une nouvelle terre. Léon Roy remarque que Jean Pelletier aura ainsi possédé et occupé au moins quatre terres avant de se fixer définitivement : "Faut-il l'en féliciter, avec ceux qui ne voient en lui que le vaillant défricheur, ou au contraire, se demander si son inconstance ne lui fut pas plutôt défavorable?" Il est vrai que Jean Pelletier, s'il avait résolu de mourir pauvre, ne pouvait pas prendre meilleur moyen d'y arriver. Mais, inconstant? qui le dira? Nous pouvons tout au plus constater le fait de ses déplacements consécutifs. Et, en cela, agissait-il autrement que beaucoup de ses contemporains? La Grande-Anse, au début, sera ainsi peuplée par des colons de Beauport qui étaient déjà bien établis près de Québec. C'est l'époque de l'expansion de la colonie, sous l'impulsion de Talon qui multiplie les concessions de seigneuries nouvelles. Concessionnaires des terres de la Grande-Anse et des environs, les Juchereau veulent les mettre en valeur. Ils sollicitent leurs compatriotes, originaires du Perche comme eux. Et c'était dans le sang des premiers canadiens : ouvrir des terres nouvelles, "faire de la terre neuve". A 52 ans, Jean Pelletier, s'il manquait de constance, ne manquait certes pas de courage. Ce n'est pas tout à côté de ses enfants, rendus à la Grande-Anse, qu'il s'installa pour refaire sa vie, mais dans un fief voisin, celui des Aulnaies, isolé, en pleine forêt, avec un seul voisin, Pierre Saint-Pierre.
La Grande-Anse
C'est aux environs des années 1675-1680 que sept colons de Beauport s'étaient établis sur les terres de Marie-Anne Juchereau, à la Pocatière :
1. Noël Pelletier, fils de Jean Pelletier, époux de M.-Madeleine Mignot
2. Guillaume Lizot, époux d'Anne Pelletier, fille de Jean
3. Nicolas Lebel, époux de Thérèse Mignot
4. Jean Mignot, époux de Louise Cloutier, père de M.-Madeleine et de Xaintes
5. René Ouellet (qui épousera en secondes noces la veuve de Nicolas Lebel)
6. Nicolas Huot-Saint-Laurent, époux de Marie Fayet
7. Jean Grondin, époux de Xaintes Mignot.
Les liens de parenté qui unissaient ces colons entre eux ne semblent pas avoir été étrangers à la formation du groupe! Nous connaissons déjà Guillaume Lizot, gendre de Jean Pelletier. Le 16 mars 1676, Guillaume vendait sa terre de Beauport pour se rendre à Sainte-Anne en compagnie des trois beaux-frères : Noël Pelletier, Nicolas Lebel et Jean Grondin. Guillaume et Anne Pelletier auront neuf enfants. Pendant que Guillaume Lizot s'établissait à l'extrémité ouest de la seigneurie, près de Saint-Roch, Noël Pelletier s'installait à l'autre bout, près de la Rivière-Ouelle. Noël aura huit enfants.
Pionnier de Saint-Roch-des-Aulnaies
Fait étrange, en 1679, Jean Pelletier ne s'établit pas à la Pocatière auprès de ses enfants qui étaient établis dans cette seigneurie depuis trois ans. Il choisit de prendre un lot dans la seigneurie de Saint-Roch-des-Aulnaies. Il y prend possession d'une terre que lui avait concédée Nicolas Juchereau : 5 arpents de front en pleine forêt vierge. En même temps que lui, un autre colon, Pierre Saint-Pierre, prend la terre voisine. De fait, commente Léon Roy (op. cit.), Jean Pelletier et Pierre Saint-Pierre furent bel et bien les deux premiers colons de Saint-Roch-des-Aulnaies. Deux ans plus tard, lors du recensement de 1681, commandé par Mgr de Laval, sur tout le territoire de Saint-Roch il n'y avait encore que "deux familles et onze âmes". Et Léon Roy croit avoir établi que pendant une quinzaine d'années ils sont ainsi demeurés les seuls colons de Saint-Roch. Les deux familles vivaient à environ 15 arpents l'une de l'autre. Ce n'est qu'en 1694 qu'un premier voisin, Joseph Ouellet, fils de René, se joindra à eux. Jean recommençait donc à zéro. Il avait 52 ans. Certes, il n'était pas seul. Il pouvait compter sur l'aide de deux fils en âge de travailler : René, 23 ans, et Jean, 16 ans. Le cadet Charles était trop jeune. Après deux ans, toujours selon le recensement de 1681, Jean avait 5 arpents de terre en valeur; il nourrissait 9 bêtes à cornes, et gardait un fusil. Mais bientôt il perdra l'aide de ses fils, René et Jean. Dès 1682, en effet, René quittait SAint-Roch pour racheter l'ancienne terre de son père, à l'Iles d'Orléans. Il sera le seul à ne pas se fixer dans la région du bas du fleuve. En 1686, c'était au tour de Jean de quitter le toit paternel pour s'établir à la Pocatière, voisin de son frère, Noël. Vers 1688, il y épousa Marie-Anne Huot-Saint-Laurent qui lui donna huit enfants. La même année, Jean Pelletier dut également se séparer de sa fille, Marie, qui épousait Jacques Gerbert, de Cap-Saint-Ignace. Il n'avait donc plus avec lui que Charles qui, en 1686, avait 15 ans et Marie-Charlotte, 12 ans. Et Jean vieillissait. Bientôt, 60 ans. On peut facilement imaginer l'isolement de Jean Pelletier, sur sa petite terre, perdue dans la forêt. Plus que deux enfants. Un seul voisin : Pierre Saint-Pierre. Pas de route autre que le fleuve, qui leur permette, à lui et à sa femme, de se rendre visiter leurs enfants et petits-enfants de Sainte-Anne.
Sa mort à Saint-Anne-de-la-Pocatière
De 1690 à 1698, année de sa mort, le nom de Jean Pelletier n'est pas cité dans les documents de l'époque. Il est cependant établi que Jean ne mourut pas à Saint-Roch, mais à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, fin février 1698, à l'âge de 71 ans. Nous croyons que Jean, vieilli et malade, ne voulut pas être à charge de son fils cadet, Charles, maintenant d'âge à prendre la relève sur sa terre de Saint-Roch, mais encore tout jeune marié. Charles, en effet, se maria en 1697, en premières noces, avec Marie-Thérère Ouellet, fille de René Ouellet, dont il aura cinq enfants. Un deuxième mariage avec Barbe Saint-Pierre portera à quinze le nombre total de ses enfants. Jean jugea sans doute plus approprié de se retirer chez un de ses enfants, à Sainte-Anne. Et comme nous savons par ailleurs que sa veuve, Anne, terminera ses jours chez Noël, c'est sans doute chez ce dernier que Jean mourut aussi. Noël était le fils aîné de Jean; pionnier de Sainte-Anne, bien établi sans doute, il est tout-à-fait plausible qu'il ait été le soutien de son père et de sa mère pendant leurs vieux jours. Mort à Sainte-Anne, Jean fut inhumé à la Rivière-Ouelle, où se trouvaient à l'époque l'unique cimetière et l'unique église de la Grande-Anse. Quant à Anne Langlois, la veuve de Jean, "la bonne femme Pelletier" comme l'écrivait son curé, l'abbé Bernard de Roqueleyn, elle se rendait le 12 janvier 1704, "à la ferme de Mr Dauteuil, où m'étant venue trouver avec son fils, Charles, à la ferme de Mr Dauteuil, (elle déclarait) avoir vendu à son fils, Charles Pelletier, la portion de terre échue à ladite veuve selon son droit de choisir qu'elle a déclaré avoir pris au nordest, consistant en deux arpents et demi de front". (Cf. greffe Janneau, 1710). Elle vendait donc à Charles la part de la terre familiale qui lui était échue en héritage à la mort de Jean. Le même greffe nous dit qu'elle vendit également ses meubles à Charles. Elle est décédée à l'âge de 65 ans, le 16 mars 1704. Elle fut, elle aussi, enterrée dans le cimetière de la Rivière-Ouelle. Au moment de sa mort, Jean Pelletier avait eu le temps de voir tous ses enfants mariés et établis : Noël, Anne, Jean et Charlotte à La Pocatière, René à l'Ile d'Orléans, et Marie, au Cap Saint-Ignace. Charles, le plus jeune des garçons, lui avait succédé sur le bien familial à Saint-Roch. A sa mort, on peut évaluer à vingt-six le nombre de ses petits-enfants qui sont alors nés. Il avait même eu la joie de connaître quelques-uns de ses arrières petits-enfants; Noël, fils de Noël, avait une fille; et Nicolas-Claude Mignot, le fils aîné d'Anne, avait deux enfants déjà. La branche des Pelletier, venus en 1641 de Tourouvre au Perche, se ramifiait rapidement.
Tiré de « Histoire et généalogie de Guillaume Pelletier 1598-1657 et son fils Jean » Pelletier, Maurice, s.j.. «Guillaume Pelletier 1598-1657 et son fils Jean». Montréal , Société généalogique Canadienne-Française, 1976, 24 p